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RAPPORT RAVIGNON : REMISE EN CAUSE DE LA SEPARATION ORDONNATEUR-COMPTABLE : UNE VOLONTE GOUVERNEMENTALE

Ce gouvernement, sous des prétextes de simplification, de "démontage" du millefeuille administratif, d’autonomie des collectivités ( alors que parallèlement il met tout en œuvre pour réduire leur autonomie financière et les mettre sous quasi tutelle), poursuit un objectif principal : LE DEMONTAGE SCRUPULEUX des principes de fonctionnement des services de l’Etat mis en place, notamment, au sortir de la seconde guerre mondiale.

Il en va ainsi du statut de la fonction publique que Stanislas Guérini veut réduire à néant après l’avoir déjà remis en cause avec la loi de transformation de la fonction publique de 2019.

Aujourd’hui il s’agit pour le gouvernement d’en finir avec les catégories, de privilégier le contrat au détriment du concours, d’en finir avec la fonction publique de carrière pour instaurer une fonction publique de filières ou de métiers et de "fluidifier" la gestion des ressources humaines....... en clair de faciliter les licenciements ( et pas seulement pour insuffisance professionnelle) pour en faire une variable de gestion des effectifs publics.

Et pour couronner le tout : l’instauration de la rémunération au mérite dont on connait les ravages pour les collectifs de travail et la perte du sens des missions et du service à l’usager.

Dans le même ordre d’idées, et plus spécifiquement pour les services de la DGFIP, il s’agit à présent d’envisager très sérieusement la fin programmée de la séparation ordonnateur/comptable qui est un principe remontant à la révolution française.

Tout le monde sait ce que cela veut dire pour les missions du secteur public local exercées dans notre administration.

C’est en effet ce qui ressort du rapport RAVIGNON " Coûts des normes et de l’enchevêtrement des compétences entre l’Etat et les collectivités : évaluation, constats et propositions" commandé par Thomas Cazenave, Ministre chargé des comptes publics.

Ainsi de la page 98 à 105 du dit rapport, on peut constater que le NRP, avec la suppression massive de postes de comptables publics et la création des CDL ( Conseillers des Décideurs Locaux) faisait partie intégrante de cette démarche de remise en cause, de même que la fin de la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable public.

Dans le rapport, les procédures de "rationalisation" comme le Contrôle Hiérarchisé de la Dépense ou l’expérimentation du Compte Financier Unique qui sera généralisée, sont jugées ......... insuffisantes en matière d’autonomie des collectivités.

Si le rapport relève que les effectifs DGFIP consacrés à la gestion financière du secteur public local ont fondu comme neige au soleil ( - 44 % entre 2009 et 2022 ).... ce n’est pas pour demander un renfort des moyens de la DGFIP en la matière mais pour continuer à considérer que les procédures de séparation ordonnateur/comptable coûtent .... TROP CHER : 1,8 milliards d’euros selon le rapporteur.

Dès lors, en bonne logique macronienne de réduction drastique des dépenses publiques quoi qu’il en coûte, la conclusion de Boris Ravignon et des Inspecteurs Généraux des Finances ( grands serviteurs de l’Etat, qui l’ont épaulé dans sa tâche) , coule de source :

Au nom de l’efficience ( c’est eux qu’ils disent) :
REFORMER POUR ALLER VERS L’AUTONOMIE FINANCIERE ET COMPTABLE DES COLLECTIVITES.

Et ils argumentent en considérant que la réforme ne remettrait pas en cause le rôle des CDL ( NRP quand tu nous tiens) mais s’intéresserait aux agents de la DGFIP en charge du contrôle et de la tenue des comptabilités.

Ils proposent ainsi de confier l’accès d’Hélios aux services des finances des collectivités et bien entendu d’en arriver à terme à l’instauration : D’UNE AGENCE COMPTABLE DE PLEIN EXERCICE avec à sa tête un agent comptable détaché de la DGFIP ou un fonctionnaire recruté par la collectivité.

Ce scénario serait ainsi privilégié pour les grosses collectivités et les intercommunalités.

Nous reviendrons prochainement plus en détail sur le contenu de ce rapport ( en pièce jointe) mais d’ores et déjà on voit bien quelle est la logique qui le sous-tend.

Au passage un bref rappel sur le principe de séparation Ordonnateur/Comptable et les raisons de son instauration dans notre pays :

Le principe de séparation des fonctions d’ordonnateur et de comptable remonte à la Révolution. Il a été inscrit pour la première fois dans les décrets des 24 vendémiaire et 17frimaire an III (15 octobre et 17 février 1794) pour les recettes, et par l’ordonnance royale du 14 septembre 1822 pour les dépenses.

Depuis, il a été constamment réaffirmé et il reste inscrit en bonne place dans les principes fondamentaux du décret GBCP (Décret relatif à la gestion budgétaire et comptable publique) du 7 novembre 2012.
Ainsi, les articles 11 et 13 du décret de 2012 rappellent que les ordonnateurs « prescrivent l’exécution des recettes et des dépenses (…) constatent les droits et les obligations, liquident les recettes et émettent les ordres de recouvrer. Ils engagent, liquident et ordonnancent les dépenses » et l’article 13 énonce que les comptables publics ont « la charge exclusive de manier les fonds et de tenir les comptes », qu’ils sont « personnellement et pécuniairement responsable des actes et contrôles qui leur incombent ».

Le principe de séparation est inscrit à l’article 9 du décret : "Les fonctions d’ordonnateur et de comptable public sont incompatibles."

Pourquoi un tel principe que d’aucuns s’évertuent à vouloir remettre en cause au nom des rigidités et des coûts et de son "absence de modernité" :

Il s’agit en fait d’un principe essentiel à la gestion publique : la séparation des ordonnateurs et des comptables est le seul grand principe financier public spécifiquement comptable .

Cette séparation poursuit une double finalité : de contrôle, en permettant de repérer les erreurs et irrégularités en amont, avant que l’argent n’ait quitté la caisse publique ; de probité, car deux agents sont moins tentés et moins faciles à convaincre de s’écarter des règles qu’un seul.

Ainsi, celui qui à le pouvoir de décision ne détient pas le pouvoir de dépenser.
Les ordonnateurs sont ceux qui « prescrivent l’exécution des recettes, engagent les dépenses et en ordonnent le paiement ». Un ordonnateur peut ainsi être un ministre, un directeur de cabinet, un préfet, un directeur régional ou départemental, un président de collectivités territoriales, un maire…
Le comptable de l’État et des collectivités locales est quant a lui un fonctionnaire de l’administration des finances publiques, en fonction au sein du ministère de l’Économie et des Finances.

C’est un principe qui, s’il a subi des aménagements, reste d’une MODERNITE totale :

le contrôle de la dépense publique et la probité ne sont pas des principes désuets mais au contraire des FONDEMENTS.

Article publié le 6 juin 2024.


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